





Ti-Gus et Ti-Mousse (1951-1983)
Réal Béland (Ti-Gus)
Denyse Émond (Ti-Mousse)
L’union fait la force
En politique, il est bon de diviser pour mieux régner: dans le show business, l’union des talents fait la force…C’est ce que
Ti-Gus et Ti-Mousse ont compris en 1951; voilà pourquoi ils sont devenus partenaires après avoir été rivaux mais très
bons copains. Les deux étaient en tournée dans le nord du Québec; Denyse Émond avec la troupe de Jean Grimaldi et
Réal Béland avec sa propre troupe. Les deux troupes donnaient des spectacles le même soir dans deux théâtres de Val-d’Or. Évidemment, le public se partage et, chacun de leurs côtés, ils ont dû jouer devant des salles à moitié vide. Après la représentation, Denyse rencontre Réal et c’est là qu’ils décident de travailler ensemble. Ce qu’il n’ont jamais regretté par la suite. Ça c’est la version 1954 du journal Le Petit Journal.
La version de 1961, dans le Radiomonde, est un peu différente même si l'essence reste la même. Réal Béland et Denyse Émond étaient tous deux en tournée aux Etats-Unis avec la même troupe. Denyse chantait et Réal était maître de cérémonie. Pendant que Denyse donnait son tour de chant, Réal aimait bien venir pousser quelques blagues et taquiner Denyse Émond. Il s'aperçut vite toutefois que cette dernière n'avait pas la langue dans sa poche et qu'elle pouvait donner la réplique à ses pointes d'humour. Réal y prit goût et, chaque soir, bien que cela ne fut pas prévu au programme, il venait sur scène échanger des propos drôles avec Denyse Émond. C'est ainsi que le numéro de Ti-Gus et Ti-Mousse prit naissance. Ils s'aperçurent qu'ils avaient beaucoup de facilité à travailler ensemble et l'idée leur vint de former leur propre troupe et de partir en tournée. C’est ainsi que la troupe de Ti-Gus et Ti-Mousse se mit à arpenter la province. Ti-Gus et Ti-Mousse font très peu de cabaret. Mais devant le succès qu'ils obtiennent, les cabaretiers commencent à engager le duo. C’est ainsi que leur premier engagement, en 1953, leur vint de M. Parenteau du Palm Café qui les engagea pour une semaine, ils y restent deux mois. Par la suite, c'est le Café de L'est et à la fin de l'années 1954 c'est un engagement de 6 mois à La Casa Loma, avec qui ils signent un contrat d'exclusivité.
À leurs débuts, en 1951, Ti-Gus et Ti-Mousse travaillaient pour 450$ par semaine alors qu’en 1961, ils gagnent jusqu'à 3000$ pour une semaine. Ils ne manquent pas de travail et ils sont actuellement retenus trois mois à l'avance. Pour souligner leur dixième anniversaire en tant que duo, ils sont en vedette au cabaret Le Mocambo pour une période de deux semaines, ce qui leur rapporte la somme de 5000$. C'est le plus fort salaire jamais payé à des artistes canadiens dans un cabaret de Montréal. Ti-Gus et Ti- Mousse n’écrivent ni leurs textes ni ne répètent leurs blagues. Ils jouent "ad lib" et ils improvisent. Au début d'un spectacle, ils savent quelles histoires ils vont raconter et les chansons qu'ils vont interpréter, mais il n'y a pas d'ordre précis. Une fois sur scène, ils trouvent de nouvelles blagues, découvrent de nouveaux effets, de sorte que leur numéro est composé d'une bonne partie d'imprévu.
En dépit de leur très grande popularité, ce n'est qu’en 1960 qu'ils sont acceptés à Radio-Canada, et on a pu les voir pour la première fois à la télévision. En 1961, ils sont en vedette à deux émissions de "Music-Hall".
En 1967, un journal « miteux », pour reprendre les mots de Réal Béland, séparent le duo. Dans les faits, Denyse et lui ont eu quelques mots, mais qui n’en a pas? Un bête malentendu, rien de grave. En acceptant un rôle dans la série Moi et l’autre, il a presque confirmé cette séparation, lui qui n’avait jamais travaillé sans sa partenaire. Pour le plaisir de leur fan, il n’en ai rien.
En 1976, pour fêter ses 25 années de tournées ininterrompues à travers les cabarets de toute la province, Ti-Gus et Ti-Mousse montent un grand spectacle en compagnie de l'ex-Jérolas Jérôme Lemay. Ce spectacle, ils l’ont intitulé "Les amuseurs" et ils l'ont déjà présenté avec succès au Centre national des Arts et à la Place des Arts. Par la suite, c'est au Grand Théâtre de Québec. Les billets se vendent tellement bien, 5,000 billets vendus à quinze jours du spectacle, on a ajouté un spectacle à minuit le samedi.
En février 1978, après plus de 25 ans de carrière et de succès,Ti-Gus et Ti-Mousse font face au plus grand défi de leur vie professionnelle. Trois soirs à La Place des Arts. "Pour nous c’est à la fois un défi et une assurance; un défi, parce que c’est la première fois que nous nous produisons seuls sur une aussi grande scène et devant autant de personnes; une assurance, parce que nous croyons sincèrement que le public nous aime suffisamment pour venir voir seulement nous. J’ajouterais même, que certaines personnes vont davantage apprécier le spectacle que nous donnerons, parce qu’ils pourront nous voir plus longtemps et rire d’autant plus."
En juillet de la même année, ils ont leur propre émission de radio sur les ondes de CKVL. Accompagnés d’André Breton, ils font rire les gens durant deux heures. L’émission est enregistrée devant public. C’est le rendez-vous du rire tous les samedis de 8h à 10h.
En 1983, 16 mai au matin, en se réveillant, à l'écoute de leur station radiophonique préférée, les québécois apprirent une bien triste nouvelle. Au cours de la nuit, subitement, Réal Béland a été fauché par la mort.
Ti-Gus n’est plus. La nouvelle a pris tout le monde par surprise car M. Béland avait rarement éprouvé des problèmes de santé. C’est maintenant, quelques jours après sa mort, que I’on prend conscience de tous les bons moments qu’il nous a fait passer au cours de sa carrière. Au début de 1984, Ti-Gus et Ti-Mousse auraient célébré leur 30ème anniversaire de vie artistique. Trente ans à faire rire les gens, d’un bout à l'autre du Québec. Une bien lourde perte pour le milieu artistique québécois.
Discographie partielle::
Une soirée au cabaret avec Ti-Gus et Ti-Mousse / Columbia / FL-236 / 1960
Une soirée au Casa Loma avec Ti-Gus et Ti-Mousse / Columbia / FL-273 / 1967
Ti-Gus et Ti-Mousse OH! / Harmonie / HFS 9057
Ti-Gus et Ti-Mousse Un rire à la seconde / Columbia / FS 543 / 1962
À la demande générale Ti-Gus et Ti-Mousse / Promo-son / JPA-7516
Ti-Gus et Ti-Mousse IH! / Harmonie / HFS 9059 / 1967
Sources:
1954 Le Petit Journal, 26 décembre, P. 68, Roland Coté
1961 Radiomonde, 30 septembre, P. 10. 11, Jacques Duval
1967 Le Petit Journal, 12 février P. 42
1972 Le Petit Journal, 24 février, P. 3. 4 Jean-Paul Sylvain
1976 Le Soleil, 13 novembre, P. F5, Louis-Guy Lemieux
1978 Télé Radiomonde 15 janvier, P.25
1978 Télé-Radiomonde, 3 septembre, P. 9, Christiane Chaillé
1983 Télé-Radiomonde, 22 mai, P. 5 Daniel Daignault
Columbia FL-236



Denyse Émond (1928- )
Ti-Mousse
Denyse Émond voit le jour le 10 mai 1928, d’un père irlandais et d’une mère d’origine amérindienne, dans le quartier de
Ville Émard à Montréal. Elle est la cinquième de sept enfants.
Elle commence sa carrière artistique très jeune en compagnie de ses trois sœurs. Elles excellent en danse et en
chansons, tout en s’accompagnant elles-mêmes à la guitare. Pour désigner leur groupe, elles prennent le nom des
Sweet Sisters. Elles se présentent à tous les concours. Elles remportent leur premier concours au Théâtre Impérial, Denyse n’a que huit ans. Après quelques années à courir les concours, les Sweet Sisters se séparent. Maintenant seule à vouloir poursuivre dans ce métier difficile et se rendant compte que la danse seule n’est pas suffisante, elle intègre le yoodle dans ses numéros. Elle interprète des chansons tyroliennes et des compositions traditionnelles de Mme Bolduc.
Elle est remarquée lorsqu'elle remporte son premier concours, Miss Popularité, qui avait lieu au Marché Atwater. C’est son père qui l’encourage, sous le couvert d’un petit mensonge, à participer à ce concours même si elle n’a que quatorze ans car les organisateurs exigent des concurrentes qu’elles aient seize ans. Elle remporte le concours haut la main. À partir de ce moment, on veut voir et entendre Denyse, les invitations arrivent de toutes parts.
Au milieu des années 1940, la popularité de Denyse ne cesse de grandir. Elle est invitée à se produire en première partie de son idole Alys Robi.
Elle participe par la suite à de nombreuses tournées avec les troupes de Tommy Duchesne, d’Omer Dumas, ainsi que celles de Jean Grimaldi. D’ailleurs le nom de Ti-mousse lui vient du fait qu’un jour Omer Dumas demande à Denyse de remplacer au pied levé un comédien de la troupe. Or il faut qu’elle s’habille en Ti-Mousse, depuis ce-jour le nom est resté. Voici ce que disait un journaliste de L'action populaire du 8 février 1951, au lendemain de la soirée donnée par la troupe d’Omer Dumas, au sujet de Denyse Émond "…Denyse Émond s'y est révélée une artiste comique endiablée. Elle a su conquérir tout l'auditoire par son jeu et son charme. Comédienne, musicienne et chanteuse de tyrolienne au joli minois, elle a fait rire aux larmes l'auditoire et parfois même ses partenaires de comédie: Arthur Pétrie, Fernand Saint-Germain, et Janine Émond, sa sœur."
C’est grâce à ces tournées qu’en 1951, elle fait la rencontre de Réal Béland. Au Capitol de Val d’Or, Réal vient voir jouer Denyse, avec la troupe d’Omer Dumas. Il lui propose de faire équipe avec lui. Nul besoin de réfléchir plus longtemps, les deux se connaissent et savent très bien ce que l’un peut apporter à l’autre. Ti-Gus et Ti-Mousse est né. La suite s’inscrit dans l’histoire du burlesque québécois. Dès le début du duo, elle devient le porte-parole, la femme d’affaires; elle décide des contrats et discute avec les patrons. “A l’époque les patrons, étaient plutôt gênés d’argumenter les décisions et condescendent toujours à mes demandes”. Sans le savoir elle s’est vite prise à l’engrenage et elle est devenue une véritable femme d’affaires qui dirige et mène sa barque comme peu d’hommes peuvent le faire."
Denyse fréquente, à l'occasion, le cabaret Le Beu qui rit, ce qui lui permet de se lier d’amitié avec le pianiste de la troupe, Roger Joubert. Un soir, après la représentation, elle accepte le dernier verre. Quelques semaines plus tard, elle lui annonce qu’elle est enceinte. Roger Joubert ne fait ni une ni deux, il demande Denise en mariage. Elle accepte. Comme elle le dit si bien elle-même dans sa biographie écrite par David Lavallée (p.184) "ce mariage est voué à l’échec étant donné que l’amour que lui porte Roger n’est pas réciproque." Au mois d’octobre 1959, Denyse Émond devient Madame Roger Joubert. Le mariage ne dure que deux ans et demi.
En septembre 1961, elle reçoit la visite d'un disc-jockey d'un poste de radio de Manchester, New-Hampshire. Celui-ci lui a confié que ses disques étaient très populaires dans la région de Manchester et que son long-jeu était même en première place sur le "hit parade" des disques français. Ce poste de radio joue fréquemment des disques français et canadiens et c'est le long-jeu de chansons tyroliennes enregistré par Denyse Émond seule qui est le plus populaire sur les ondes.
En mars 1971, les téléspectateurs ont l’agréable surprise de retrouver réuni pour la première fois dans le cadre de “Moi et l’autre’’ le célèbre duo Ti-Gus et Ti-Mousse. Denyse y joue le rôle de l’ex-petite amie de Gustave (Réal Béland). On réinvite Denyse l’année suivante.
En juin 1974, Denyse Émond perd sa mère. Denyse intente des poursuites contre les dirigeants de l’établissement, où demeure sa mère, pour négligence. Sa mère est tombée, il y a eu une opération, mais personne n’avait averti la famille de cet incident.
Au mois de mai 1983, on annonce le décès de Réal Béland. Cruel destin qui vient ainsi arracher Denyse Émond à son irremplaçable camarade de scène. Courageusement, elle poursuit son métier en acceptant de jouer dans des séries télévisées dont Épopée Rock et 101 avenue des Pins, écrit par Denise Filiatrault, ou elle joue le rôle de la concierge de l’immeuble, rôle qui devait être tenu par Réal Béland. Et voilà qu'en 2004, la chanteuse aux accents tyroliens rebondit en lançant un disque « Le rideau s’ouvre ».
Discographie partielle:
Les grands succès de Denise Émond / Columbia / FL-219 / 1958
Sources:
Denyse Émond Ti-Mousse, Biographie Les éditions JCL, David Lavallée
1951 L'Action Populaire, 8 février
1961 Radiomonde, 2 septembre, P. 8, Jacques Duval
1970 Télé-Radiomonde, 3 janvier, P. 15, Pierre Nadeau
1970 Photo-Journal - tout par l'image, 8 novembre, P. 52, Lise Lapierre
1971 Télé-Radiomonde, 3 avril, P. 13
1983 Télé-Radiomonde, 17 juillet, P. 3
Columbia FL-218

